Accueil. Cycle de Shaedra, Tome 10: La Perdition des Fées
Je me réveillai après un sommeil agité où je tombais et tombais dans un puits sans fond. Des claquements traversèrent mon esprit ensommeillé.
“Shaedra !”
Le ton angoissé était pressant et, un instant, je crus qu’il s’agissait de Syu, mais bien vite je rectifiai en percevant la présence bréjique.
“Zaïx”, soufflai-je mentalement. Ça, c’était une surprise. La tête me faisait horriblement mal et je n’essayai même pas d’ouvrir les yeux. Je remarquai pourtant que j’étais à présent allongée sur un matelas douillet. Combien de temps avais-je pu dormir ?
“Shaedra”, répéta le Démon Enchaîné. “Nous avons un problème. Spaw m’a raconté ce qui est arrivé. Maintenant, on le poursuit. Je ne veux pas t’accuser, mais tu dois arranger ça.”
Ses paroles me plongèrent dans une complète confusion.
“On le poursuit ? Qui le poursuit ?”
“Les gardes d’Ato. Ils pensent que c’est un démon, je crois que c’est parce qu’il t’a accompagnée à l’Île Boiteuse. Dis-moi, où es-tu exactement ? Je n’arrive pas à me faire une idée.”
À présent, j’avais ouvert les yeux, atterrée, prêtant à peine attention à la petite chambre où le hobbit m’avait portée. Spaw, pensai-je en frémissant. Je sentis que mon cœur se glaçait en pensant qu’assurément, c’était ma faute et uniquement ma faute. Je murmurai faiblement :
“Je crois que je suis dans le village de Kaarnis.”
Zaïx eut un sursaut mental, surpris.
“Ça alors, et… que fais-tu là-bas, ma fille ?”
Je fis une moue et je me redressai, jetant un coup d’œil autour de moi. Il n’y avait pas grand-chose à voir : la chambre était étroite et un voilage rouge couvrait la sortie en guise de porte. On entendait des voix proches. J’avais la tête qui tournait et je remarquai que j’avais repris ma forme de terniane. Mes bras, couverts de blessures, avaient été nettoyés de boue. En réalité, je ne portais plus ma tunique mais une simple chemise verte et soyeuse.
“Shaedra ?”, s’inquiéta Zaïx après un silence.
“Je cherche Kyissé”, répondis-je finalement, me dégourdissant un peu l’esprit.
“Kyissé… la Klanez ? Hum”, médita-t-il, tandis que j’acquiesçais. “Écoute, Shaedra. Pour une fois, je crois que Spaw a besoin d’aide. Je lui ai dit de rentrer à la maison, mais il craint que l’on suive sa piste. Tu es la seule qui puisse l’aider. Nidako est à des semaines de voyage, dans la Mer des Aiguilles, et Modori… bon, c’est un chercheur, pas un guerrier. S’il arrivait quelque chose à Spaw…”
Sa frayeur était si évidente qu’une seconde, je crus qu’il perdrait la concentration et romprait le contact bréjique.
“Zaïx, je…” Je m’interrompis sans savoir quoi lui dire ou plutôt sans oser lui avouer que, si Spaw ne parvenait pas à égarer ses poursuivants, je ne pourrais pas le sauver. Je me représentai soudain le regard froid d’Ew Skalpaï pointant son épée sur la gorge de mon ami et l’horreur me coupa un instant la respiration. “Où est-il ?”, demandai-je.
“En train de s’enfuir d’Ato. Du moins, c’est ce qu’il faisait quand j’ai parlé avec lui, il y a à peine deux heures. Promets-moi de l’aider.”
J’inspirai profondément. Ceci était seulement la deuxième promesse que me demandait Zaïx d’une manière aussi formelle. Mais je ne pouvais le tromper en lui promettant quelque chose qu’il me serait peut-être impossible de réaliser.
“Je ferai ce que je pourrai, Zaïx.”
“Il ne doit rien lui arriver”, insista-t-il. Je remarquai qu’il se retirait, l’air fatigué. Pensait-il que j’avais des pouvoirs magiques pour me télétransporter auprès de Spaw et arrêter un groupe de gardes pagodistes ?, me demandai-je, l’humeur sombre.
Je soupirai profondément. Et tout cela… à cause de haines ridicules qui persistaient entre saïjits et démons. Au moins, beaucoup de démons avaient appris à vivre avec les saïjits. Par contre, ces derniers semblaient incapables de raisonner un minimum, grognai-je. J’essayai de ne pas me laisser envahir par la peur. Spaw allait s’en sortir, affirmai-je. Il devait s’en sortir.
Quelqu’un tira le rideau et une silhouette apparut dans l’encadrement de la porte.
— Iharath ! —fis-je, en clignant des paupières à cause de la lumière.
Le visage du semi-elfe s’illumina d’un sourire.
— Shaedra —prononça-t-il, en s’accroupissant prestement auprès de moi—. Je commençais à craindre que tu ne te réveilles pas. Cela fait trois jours que tu dors.
J’en eus le souffle coupé.
— Trois jours ? —articulai-je.
— C’est cela. Teb Kaarnis t’a donné un sirop pour que tu dormes profondément et pour que tu te rétablisses plus vite.
Je sifflai entre mes dents et je passai ma main sur mes joues, comme pour chasser cet engourdissement qui ne semblait pas vouloir me quitter.
— Teb Kaarnis —murmurai-je—. Kaarnis en personne m’a donné du sirop ?
Iharath acquiesça joyeusement.
— C’est cela. Et il nous héberge dans sa maison. Tu sais ? Je commence à me rendre compte qu’en réalité, les démons ressemblent beaucoup aux saïjits.
J’esquissai un sourire.
— Je m’en réjouis. —Je marquai une pause et je plissai le front— : Mais… Kaarnis ? Il sait que vous n’êtes pas… ?
Iharath posa l’index sur ses lèvres pour m’imposer silence.
— Kaarnis sait qui nous sommes. Mais les autres ne le savent pas. Selon lui, c’est déjà beau que sa communauté accepte d’avoir une vampire parmi eux. Enfin… il a quand même pris des mesures pour s’assurer que Drakvian n’attaque personne. —Il soupira, fatigué—. Je lui ai bien dit que ce n’était pas nécessaire, mais je comprends qu’il se méfie. En plus, Drakvian n’arrête pas de faire des plaisanteries de mauvais goût. Combien de fois je lui ai répété que la plupart des gens ne comprennent pas son humour. —Il se racla la gorge et ajouta— : Du coup, ils la maintiennent prisonnière dans un arbre.
Je le regardai bouche bée.
— Dans un arbre ?
— Étrange, n’est-ce pas ? En fait, c’est la seule prison qu’ils aient —expliqua-t-il—. Les arbres par ici sont très larges et, visiblement, ils sont souvent creux à l’intérieur et on les utilise pour garder des vivres et des outils communs. Et un de ces arbres creux leur sert quand ils doivent enfermer quelque bête pour les fêtes. Kaarnis a essayé de me l’expliquer. Drakvian est… de très mauvaise humeur —affirma-t-il tandis que je roulais les yeux devant l’évidence—. Maintenant, elle ne me répond même pas. Elle a même craché sur la grille pour que personne n’ose s’approcher. Tu devrais lui parler quand tu seras un peu plus remise. Peut-être que tu réussiras à la calmer un peu.
J’acquiesçai et je demandai, anxieuse :
— Et Galgarrios ?
— Il va bien. Bon, il est en train de se rétablir comme toi. Il avait d’autres blessures que celle de la jambe et elles s’étaient infectées.
Je soufflai.
— Et pourquoi ne l’a-t-il pas dit plus tôt ?
Iharath haussa les épaules.
— Comme lui a dit Wujiri, ce n’est pas bon d’être trop courageux. Mais il va beaucoup mieux —assura-t-il—. Tout de suite, il dort. Et Wujiri aussi. Le pauvre elfe noir dit qu’il est totalement dépassé par les évènements —rapporta-t-il en souriant—. Il dit qu’il ne sait plus où est le Bien et où est le Mal.
Je lui rendis son sourire.
— Eh bien, espérons qu’il finira par trouver —murmurai-je. Le soulagement de savoir que tous mes compagnons allaient bien me redonna un peu de courage—. Et Syu ? —demandai-je enfin.
Tout en se relevant, Iharath répondit :
— Il t’a veillée presque sans pause. Et il est sorti tout à l’heure pour explorer la zone. —Ou plutôt pour explorer les arbres, pensai-je, amusée—. Tu devrais te reposer. Tu es à moitié endormie.
— À cause du sirop —marmonnai-je.
— Peut-être. Je dirai à Kaarnis qu’il cesse de te donner ce breuvage. Il a l’air efficace, mais…
— Mais une bonne assiettée de riz le serait davantage —répliquai-je, en l’interrompant—. J’ai faim —déclarai-je, en me redressant.
Debout près du matelas, Iharath s’esclaffa.
— Je ne sais pas s’ils ont beaucoup de riz par ici, mais ils ont une sorte de semoule pas mauvaise du tout.
— Ce sera amplement suffisant —affirmai-je, en me levant—. Arrg —laissai-je échapper, me sentant vaciller.
Iharath me prit par le bras.
— Tu sais, tu nous as fait une de ces peurs quand tu as disparu dans ce puits —avoua-t-il d’une voix profonde, tandis que nous sortions de la pièce—. Je te jure que j’ai pensé que nous t’avions perdue à jamais.
J’avalai ma salive.
— Moi aussi, je l’ai cru.
Iharath m’aida à m’asseoir sur une chaise, face à une longue table de bois blanc. La salle était à présent déserte et silencieuse.
— Attends ici, je t’apporte tout de suite à manger.
Je le regardai sortir, reconnaissante, et je demeurai assise, très droite, sur ma chaise, sans oser appuyer les coudes sur la table à cause des blessures. Peu après, j’entendis des murmures et bientôt Iharath réapparut, suivi du hobbit chez qui j’étais entrée sans la moindre éducation. Les cheveux noirs et les traits durs, il était encore transformé et j’en déduisis qu’il s’agissait probablement d’un tahmar. Il me sourit et toute trace de sévérité disparut.
— Taü kras —prononça-t-il, en réalisant une salutation—. C’est un plaisir de te voir enfin éveillée.
Je lui répondis poliment en portant ma main sur mon épaule gauche. Alors, la réalité me frappa. Ce hobbit…
— Tu es… Kaarnis ? —balbutiai-je tandis qu’Iharath posait devant moi une assiette qui avait l’air succulente.
Le démon acquiesça tranquillement et s’assit en face de moi en disant :
— Je suis Teb Kaarnis, fils de Nalan Kaarnis.
Je rougis.
— Je… je suis désolée d’être entrée chez toi, de cette façon, si… soudaine.
Un sourire sillonna de nouveau le visage de Kaarnis.
— À dire vrai, j’ai eu une sacrée peur. Heureusement, Zanda venait de m’avertir de ce qui était arrivé et j’ai tout de suite déduit que tu devais être la jeune fille en péril. Je ne voudrais pas parler de souvenirs sûrement désagréables, mais je suis curieux de savoir… Comment as-tu réussi à survivre à une chute mortelle ?
Iharath s’était assis lui aussi et tous deux me regardaient attentivement. Je pris la cuillère en bois et, avant d’avaler ma première bouchée, je leur dis :
— Je ne suis pas tombée. Du moins, pas jusqu’en bas. J’ai trouvé une sorte de trou qui s’est avéré être un tunnel très étroit. J’ai rampé et j’ai débouché sur une petite grotte, près de cette maison.
J’engloutis une cuillerée et la douce saveur de la semoule finit de réveiller ma faim. Je m’appliquai donc à manger, tandis que Kaarnis acquiesçait pour lui-même.
— Tu as eu de la chance, alors. Parce que sinon, tu serais tombée directement sur les récifs de la cascade, si je ne me trompe. Enfin, ne parlons plus de mésaventures. Ga m’a expliqué que tu appartenais à la communauté de Zaïx. J’ignorais que le Démon Enchaîné avait formé une communauté.
Je hochai la tête affirmativement et j’avalai les céréales.
— Elle est petite, mais elle existe —soulignai-je.
Elle était petite… et il se pouvait bien qu’elle se réduise encore davantage si l’un de ses membres finissait brûlé sur un bûcher. Cette pensée réveilla de nouveau mes craintes. Et tout en mangeant, je me demandai pourquoi diables je devais toujours compliquer la vie de Spaw. Décidément, j’aurais agi plus intelligemment si j’avais rejoint le refuge de Zaïx, de Sakuni et de Modori après être entrée dans la confrérie des Ombreux : de cette façon, aucun garde d’Ato ne serait à présent en train de pourchasser des démons. Je ne voulais pas penser à ce que feraient Kaarnis et les autres communautés lorsqu’ils apprendraient que j’avais gaffé d’une manière aussi flagrante.
— D’après ce que m’a raconté la vampire, tu t’es transformée en démon à cause d’une potion —poursuivit Kaarnis.
— Il y a trois ans, exactement —précisai-je—. Et, oui, j’ai bu une potion sans savoir ce que c’était et ma Sréda s’est affolée.
Kaarnis semblait vivement intéressé.
— Alors, ce devait être une potion d’un alchimiste démon.
— De Seyrum —acquiesçai-je.
— Hum. On dit que c’est le meilleur alchimiste de la Superficie. —Après un bref silence, il ajouta— : Excuse mon indiscrétion, mais je suppose que quelqu’un a dû s’occuper de ton instruction durant ces années, n’est-ce pas ?
J’avais déjà terminé mon assiette et je vidai mon verre d’eau avant de répondre :
— Bien entendu. Kwayat s’est chargé de m’instruire.
Kaarnis sourit ouvertement.
— Bien entendu. Cet homme m’a toujours paru très spécial. —Son visage se fit songeur—. Je l’ai vu une fois, il y a des années. Je me souviens bien de son visage et de son expression. On aurait dit… qu’il affrontait constamment son passé dans une lutte éternelle.
On ne pouvait pas mieux dire, pensai-je. J’esquissai un sourire sombre.
— Kwayat est une personne entourée de mystères. Au fait, c’était délicieux —dis-je, en signalant l’assiette.
Curieusement, le sourire de Kaarnis me rappelait un peu celui du maître Dinyu.
— Eh bien, il vaudra mieux que tu retournes dans la chambre et que tu dormes autant que tu en auras besoin —conclut-il, en se levant.
J’acquiesçai, je me relevai et je le saluai respectueusement, en levant mes deux mains vers mes épaules opposées.
— C’est un honneur pour nous d’être hébergés chez toi —prononçai-je.
Le hobbit accueillit mes remerciements d’un bref geste de la tête.
— Et pour moi, un honneur de vous accueillir. À vrai dire, moi qui adore les étrangetés, je n’avais jamais vu un groupe aussi bigarré que le vôtre.
Son commentaire nous arracha à Iharath et à moi un sourire.
— Où est Ga ? —demandai-je.
— En train de dévorer toutes les fleurs de la caverne, sûrement —plaisanta le hobbit.
— Hum. Et Frundis ? —laissai-je échapper, avant de me rendre compte qu’il était plus que probable qu’il ne sache pas qui était Frundis.
— Il est dans le salon —répondit cependant Kaarnis à ma grande surprise—. J’étais justement en train d’écouter une de ses chansons. C’est une personne très étrange. Et un ami loyal : il n’a répondu à aucune de mes questions. Sauf à celles qui avaient à voir avec la musique, bien sûr.
Je me mordis la lèvre. Je ne me rappelai pas que quelqu’un m’ait jamais parlé de Frundis en employant le mot « personne ».
— Je peux… le reprendre ?
Kaarnis acquiesça aussitôt.
— Je te le rends tout de suite.
Il disparut derrière un rideau et, moi, je retournai en clopinant dans ma chambre, suivie d’Iharath.
— Bonne nuit, Shaedra —me murmura celui-ci lorsque j’écartai le rideau rouge—. Je crois que je vais suivre ton exemple. La vérité, c’est que, dans ces cavernes, je ne sais plus jamais quand il est l’heure de dormir. Peut-être qu’en ce moment, il est midi à la Superficie. C’est une curieuse sensation —avoua-t-il, en se frottant la joue.
Visiblement, Iharath non plus ne semblait pas convaincu par la vie souterraine, observai-je. Kaarnis revint avec Frundis et je ne tardai pas à lui souhaiter bonne nuit et à m’allonger avec le bâton. Celui-ci se réjouit de me voir et me déclara avec entrain :
“Ce hobbit possède une curiosité admirable, mais j’avoue que je commençais à me lasser de lui expliquer l’art du contrepoint. C’est incroyable comme ils sont folkloriques dans ce village. Apparemment, ils ne jouent que de la guitare et du tambour. Ce n’est pas que ce soit mal, mais tu te rends compte ? Ils n’ont jamais vu un piano de leur vie ! Bah, moque-toi comme Syu si tu veux”, grogna-t-il quand je laissai échapper un petit rire étouffé. “Comment vas-tu ?”
Je lui frottai le pétale bleu et j’entendis de douces notes de flûte.
“Beaucoup mieux”, assurai-je. Peu après, je m’endormis et je rêvai que j’étais de retour au Cerf ailé. Kirlens me regardait avec horreur et, moi, je me rendais compte que j’étais transformée en démon. Je partais en courant et, seulement après m’être éloignée d’Ato, je m’apercevais que j’avais abandonné Spaw. Mais alors Marévor Helith arrivait avec Jaïxel, et tous deux le sauvaient et lui donnaient une malle remplie de capes vertes. Je me réveillai en riant aux éclats. Toutefois, je me tus presque aussitôt en pensant qu’à cette heure Spaw ne s’inquiétait sûrement pas de sa cape, plus occupé à échapper à des assassins… à moins que ces derniers ne l’aient déjà capturé.
Je clignai des paupières. Je me sentais beaucoup plus reposée et je pris le temps de méditer. Puisque, apparemment, tous mes compagnons allaient bien, mes pensées et mon inquiétude se tournèrent vers Spaw. S’il était effectivement poursuivi, Aléria et Akyn devaient soupçonner que Maoleth, Kwayat, Askaldo, Skoyéna, Lilirays, Arfa et tant d’autres étaient aussi des démons. Aléria devait probablement se demander pourquoi ils avaient alors mis fin à la vie de l’un des leurs. Il fallait espérer qu’elle comprendrait que Driikasinwat et ses sympathisants ne représentaient qu’une partie de la population des démons… Mais rien que de me rappeler l’éclat vindicatif d’Aléria en parlant des Droskyns, je commençai finalement à douter qu’elle ne soit pas capable de révéler tout ce qu’elle savait au Mahir. Et dans ce cas, je devais avertir les autres, mais comment ?
J’entendis de soudains claquements mentaux et l’incroyable coïncidence me fit écarquiller les yeux.
“Zaïx !”, m’exclamai-je précipitamment. “Quelle coïncidence ! J’ai besoin que tu m’aides à avertir d’autres démons qu’ils sont en danger…”
“C’est à moi que tu parles ?”, m’interrompit le bâton, railleur.
Je soupirai et je me traitai d’idiote.
“Frundis, pourquoi ces claquements ?”
“Je composais”, répliqua-t-il patiemment.
“Mmpf. Bonjour, Frundis.” Je le laissai composer et je sortis de la chambre, en m’étirant comme un singe gawalt. Aussitôt, une boule de poils grimpa avec rapidité sur mon épaule en criant mon nom.
“Syu !”, fis-je joyeusement, en lui frottant le menton.
Le singe s’éloigna vers l’une des fenêtres et déclara solennellement :
“Vu que tu m’as abandonné, il n’y a qu’une solution pour que je te pardonne.”
Il écarta le rideau et indiqua de la main le paysage avec enthousiasme. Il me montrait les arbres, bien sûr. Je souris.
“Je commence à comprendre ce que tu proposes. Je déjeune et nous faisons une course”, lui promis-je. Soudain, j’entendis un coup contre le bois derrière moi et je me retournai. En voyant Galgarrios sortir de sa chambre avec une canne, je bondis de joie et je me précipitai vers lui pour l’embrasser avec précaution.
— Galgarrios, tu ne sais pas combien je suis contente de voir que tu vas mieux ! —avouai-je.
Le caïte sourit, mais il adopta aussitôt une expression affligée.
— Shaedra —murmura-t-il, la tête baissée—. Quand je pense que j’ai failli te tuer…
Je demeurai stupéfaite.
— Quoi ?
Il soupira.
— Frundis m’a échappé. Je ne voulais pas le lâcher, mais je ne savais plus ce que je faisais, j’ai perdu l’équilibre et…
— Galgarrios —l’interrompis-je, exaspérée—. Ce n’est pas ta faute si je me suis jetée dans un puits. D’où sors-tu ces idées ?
Mon ami haussa les épaules et soupira.
— D’après Iharath, Frundis était suspendu juste au-dessus du trou. C’est pour ça que tu es tombée : parce que tu es allée le récupérer. Je ne me suis jamais senti aussi honteux —avoua-t-il.
Je le regardai fixement.
— Mon ami —dis-je avec plus de calme—. Si tu as honte pour quelque chose d’aussi absurde, je préfère ne pas penser à la honte que, moi, je devrais ressentir. Cesse de te tourmenter. Un gawalt ne ferait pas ça —lui dis-je en souriant—. Comment va ta jambe ?
Le caïte sembla faire un effort pour retrouver la bonne humeur et il me rendit un léger sourire.
— Mieux. À dire vrai, elle ne me fait plus mal.
Peu après, Kaarnis apparut en se frottant les yeux pour se réveiller et nous lui souhaitâmes le bonjour avant de nous installer à table. Le petit déjeuner se composait de poissons pleins d’arêtes que le Démon Majeur appela bugres rouges et qui me rappelèrent un peu les truites du Tonnerre en plus petit. Bientôt, Wujiri et Iharath arrivèrent, les cheveux trempés, disant qu’ils s’étaient baignés dans la rivière. L’elfe noir avait ôté son armure et sa tunique de garde. Il paraissait détendu et je devinai, amusée, qu’il ne se sentait pas trop menacé par les démons. Il ne semblait pas non plus m’en vouloir de ne pas lui avoir révélé plus tôt ma véritable nature.
Pendant que nous mangions, nous bavardâmes sereinement de la vie de la Communauté de l’Obscurité. D’après ce que nous expliqua Teb Kaarnis, les gens de la caverne vivaient surtout de fruits, de poissons et de céréales.
— Cette zone était une des plus riches, au temps du royaume de Shilabeth —raconta Kaarnis, tandis que nous terminions nos assiettes—. La terre est très fertile, les arbres donnent toujours des fruits et la caverne est difficile d’accès. Il est rare que des créatures viennent nous déranger. Comme vous voyez, c’est un vrai paradis —affirma-t-il.
Je souris en l’entendant parler avec tant de conviction. Je terminais déjà ma dernière bugre rouge quand j’entendis des bruits réguliers au-dehors et je levai les yeux, étonnée.
— Ce sont nos gardes —expliqua Kaarnis, en voyant que je me levais pour jeter un coup d’œil à l’extérieur—. Ils s’entraînent régulièrement lorsqu’ils ne sont pas en patrouille.
Wujiri arqua un sourcil.
— Vous avez beaucoup de gardes ? —s’enquit-il, intrigué.
Le Démon Majeur haussa les épaules.
— Neuf guerriers et un maître d’armes. Six d’entre eux sont en faction hors du village. Les autres, vous les connaissez déjà, ils sont rentrés avec vous.
Kojari, Zanda et Rayth, compris-je. Curieuse, j’écartai le rideau d’entrée. Plus bas, dans un léger creux qui séparait le village du bois, Kojari et Zanda s’entraînaient, entrechoquant des bâtons en forme de sabre avec des mouvements précis et réguliers. Je vis rapidement que Kojari se débrouillait mieux que Zanda ; malgré tout, ayant observé tant de combats d’entraînement dans ma vie, il ne me fut pas difficile de percevoir une certaine témérité dans certains de ses mouvements. Je réprimai alors un sourire ironique en me rendant compte que j’analysais le combat comme je l’aurais fait face au maître Dinyu.
“Et la course ?”, me rappela innocemment Syu, perché sur mon épaule. J’acquiesçai et je me tournai vers Kaarnis, indécise.
— Euh… Je peux sortir, n’est-ce pas ? —demandai-je.
Le hobbit parut surpris.
— Naturellement ! Bien entendu.
Je souris largement, je les saluai tous et je m’empressai de m’habiller et de prendre Frundis avant de sortir de la maison et de me diriger vers le bois. Sur ma droite, s’alignaient des huttes de rondins et de roche presque entièrement dissimulées derrière la végétation. D’après Kaarnis, la Communauté de l’Obscurité comptait trois cent vingt-sept membres, mais tous ne vivaient pas dans cette caverne. Même ainsi, je n’avais jamais été entourée d’autant de démons et cela me semblait étrange de penser que nombre de ces habitants, eux, n’avaient jamais vu de saïjits de leur vie. Probablement pour cette raison, ils ne pouvaient imaginer que Wujiri, Iharath et Galgarrios ne soient pas des démons. Je passai près de Kojari et de Zanda, et les deux humains interrompirent un instant leur combat pour me saluer, avant de reprendre la lutte, concentrés. J’aurais aimé les remercier d’avoir ramené sains et saufs tous mes compagnons jusqu’au village, mais je poursuivis mon chemin sans oser dire un mot. Une fois dans le bois, Syu, hyperactif, se mit à flairer toutes les racines. Les arbres étaient immenses.
“Ces arbres doivent bien mesurer trente mètres”, estimai-je, en promenant un regard impressionné autour de moi.
Le singe gawalt indiqua un des arbres.
“Celui-ci est le plus haut que j’ai trouvé”, m’informa-t-il, enthousiaste.
Je levai les yeux et je pâlis en voyant que la cime se perdait dans les ombres de la caverne.
“Syu… tu es devenu fou ? En plus, les premières branches sont à plusieurs mètres de hauteur”, me plaignis-je, en examinant le tronc d’un air critique.
Le singe croisa les bras et me contempla avec goguenardise.
“Tu as peur ?”
Je grognai.
“Je croyais qu’un gawalt était plus prudent.”
“Prudent, mais sans exagération”, rectifia Syu. “En plus, un peu d’aventure ouvre toujours l’esprit.”
Je roulai les yeux.
“Ça, tu le tires de Frundis”, devinai-je.
Syu haussa les épaules et continua à me fixer du regard. Sa pose me parut si amusante que j’éclatai de rire et je cédai :
“C’est bon.” Je rangeai Frundis dans mon dos. Le bâton murmurait et marmonnait pour lui au milieu d’accords de violons et d’accordéons. “À trois”, déclarai-je, en sortant mes griffes.
Syu se chargea de compter et nous filâmes comme des flèches vers le haut. L’écorce du tronc offrait beaucoup de prises et je savais donc qu’en cas de problème, je pourrais toujours enfoncer mes griffes et m’immobiliser. Nous atteignîmes rapidement les premières branches et nous allions continuer à grimper lorsque Syu poussa un cri de surprise et je me figeai. Qu’est-ce que… ?
Confortablement assise au cœur de l’arbre, un fruit jaune dans la main, une terniane me contemplait, aussi surprise que moi. Elle se remit la première. Elle avala le fruit qu’elle mangeait et effectua le même salut précis qu’effectuait toujours Kwayat. C’était un geste réservé aux instructeurs. J’ouvris grand les yeux, étonnée, tout en lui répondant par un salut plus humble. Que faisait une instructrice de démons perchée dans un arbre ?
— Laisse-moi deviner —fit-elle d’une voix posée—. Tu es la jeune fille qui est apparue chez Kaarnis il y a quelques jours, n’est-ce pas ? —J’acquiesçai, en rougissant—. Hum. Alors, tu dois être Shaedra —déclara-t-elle—. Je vois que, malgré tes blessures, tu as déjà commencé à faire des exercices quelque peu périlleux —observa-t-elle—. Mon nom est Daorys. J’ai entendu dire que vous êtes en quête d’une spiartea de soleil. Est-ce vrai ?
Je perçus une pointe de moquerie et de scepticisme dans sa voix et j’arquai un sourcil. Croyait-elle donc que nous ne cherchions pas réellement cette spiartea ? J’ignorais s’il était judicieux de donner plus de détails à cette inconnue, mais je précisai :
— Théoriquement, nous sommes à la recherche d’une fillette qui a été enlevée.
— Oui, j’ai aussi entendu cela —médita l’instructrice. Je réprimai un soupir et je me demandai que diables avaient pu raconter Ga, Wujiri et Iharath à Kaarnis pour que tout le monde en sache autant—. J’ai aussi entendu que cette fillette n’est pas n’importe quelle fillette. —Elle me regarda avec insistance, mais je ne desserrai pas les lèvres, indécise. Daorys jeta le trognon de son fruit dans le vide d’un geste désinvolte avant d’ajouter— : Apparemment, c’est l’une des dernières nixes qui existent dans la Terre Baie.
Je penchai la tête de côté, déconcertée.
— Des nixes ? —répétai-je.
La terniane fronça légèrement les sourcils.
— Ne cherchez-vous pas une Klanez ? Eh bien, autant que je sache, les Klanez sont une famille de nixes. —Elle me regarda, incrédule—. Tu ne le savais pas ?
— Non. Franchement, je ne sais même pas ce que sont les nixes —admis-je, en essayant de ne pas m’alarmer. Daorys était restée perplexe, comme surprise face à mon ignorance. Je jetai un regard à Syu. Assis sur une autre branche, le singe suivait l’échange avec un intérêt relatif, impatient sûrement d’aller découvrir les branches les plus hautes.
“Tu sais ce que sont les nixes, toi ?”, m’enquis-je.
La moue du singe me suffit comme réponse.
— Je suppose que ce n’est pas si étrange que tu ne connaisses pas les nixes —dit enfin Daorys—. En fin de compte, ils sont très peu nombreux et ils se cachent bien. Certains du village les appellent « fées ». Mais, en toute rigueur, ce sont des nixes. —Mon expression confuse lui fit secouer la tête—. La saïnal devait le savoir si elle a effectivement parlé avec ceux qui ont emmené la nixe… Sais-tu où je peux la trouver ? —me demanda-t-elle.
— Eh bien, non —avouai-je, agitée—. Alors… tu crois que Kyissé a été enlevée par les nixes pour la conduire à son foyer ?
— C’est ce qu’on dirait, visiblement. Ce que je me demande, c’est pourquoi un groupe aussi étrange que le vôtre, appartenant à une communauté… —elle hésita et prononça— : aussi récente et, de plus, accompagné d’une vampire, recherche une jeune nixe et une fleur de cristal. Je suppose que vous devez avoir vos raisons —ajouta-t-elle en souriant, tandis que je la regardais les yeux grand ouverts.
— Quooi ? —prononçai-je—. La spiartea de soleil est une fleur de cristal ? —Je ne sais comment, je me souvenais que les fleurs de cristal étaient des plantes rocheuses souterraines regorgeant d’énergie bréjique et capables de provoquer des troubles graves à quiconque s’en approchait.
Atterrée, je vis Daorys acquiescer de la tête.
— En tajal, on l’appelle spiartea de soleil parce qu’elle brille dans l’obscurité. Spiartea est un mot très ancien synonyme d’« ombre ». —Elle fit une moue moitié incrédule moitié amusée—. À ce que je vois, Ga vous a tout expliqué très clairement. Reste à savoir pourquoi diables elle veut une fleur de cristal. Les saïnals ont parfois des idées que même les démons ne peuvent arriver à comprendre —elle sourit. Elle amorça un geste pour agripper une branche et entreprendre la descente, mais elle s’arrêta et tourna vers moi ses yeux d’un vert très clair—. Au fait, Kaarnis m’a dit que Kwayat s’est occupé de ton instruction. Je suppose que cela signifie qu’il se porte bien.
J’arquai les sourcils.
— Eh bien, la dernière fois que je l’ai vu, il allait bien —lui assurai-je—. Tu le connais ?
Daorys esquissa un demi-sourire.
— Oui.
D’un léger geste de la tête, elle me salua et elle disparut agilement derrière le tronc. Syu et moi, nous nous rapprochâmes du pourtour de l’arbre pour la regarder descendre. Elle avait l’air de connaître cet arbre par cœur, remarquai-je. Quand elle atteignit le sol, je m’appuyai contre une grosse branche, songeuse, tandis que Syu s’éloignait pour explorer l’arbre à fond.
Visiblement, Ga ne m’avait pas dit toute la vérité. Bien sûr, elle avait peut-être pensé que, si elle me révélait que Kyissé était une « nixe », j’aurais compris où ils l’avaient emmenée et j’aurais renoncé à chercher cette « fleur de cristal ». Une nixe, me répétai-je, abasourdie. Est-ce que cela signifiait que Kyissé n’était pas une saïjit ? En y réfléchissant posément, je n’avais jamais réussi à déterminer à quelle race elle appartenait mais, à vrai dire, je n’avais jamais accordé beaucoup d’importance à ce sujet. Daorys avait parlé de fées. Mais, moi, j’avais toujours cru que les véritables fées étaient des créatures oubliées et éteintes depuis longtemps. En tout cas, si Kyissé était saine et sauve, ce n’était vraiment pas grâce à mon efficacité : quatre jours déjà s’étaient écoulés depuis que nous avions disparu par la Tour de Shéthil.
Soudain, j’entendis des claquements et je plissai les yeux, pensant qu’il s’agissait de quelque blague de Frundis, mais alors la voix de Zaïx me fit sursauter.
“Shaedra. Tu es réveillée ? Je viens comme simple messager.”
J’arquai un sourcil face à son ton monocorde et un peu courroucé. En tout cas, il était inédit que Zaïx établisse deux connexions bréjiques dans un laps de temps aussi court. En plus, j’avais toujours pensé qu’un sortilège aussi puissant, même avec le soutien des chaînes d’Azbhel, devait requérir beaucoup d’énergie.
“Zaïx”, soupirai-je, soulagée. “Eh bien, moi, j’aimerais te demander une faveur…”
“Spaw aussi m’en a demandé une”, me coupa-t-il. “Il t’enjoint de ne pas bouger de là où tu es et de ne surtout pas essayer de l’aider. Il m’a même menacé de se rendre si je refusais de répéter ses paroles”, soupira-t-il, de mauvaise humeur.
Je secouai la tête. Pourquoi la réaction de Spaw ne me surprenait-elle pas ? Enfin, de toutes façons, même s’il avait demandé de l’aide, il l’aurait sûrement reçue trop tard.
“J’en déduis que les gardes ne l’ont toujours pas trouvé”, observai-je, optimiste.
Zaïx acquiesça mentalement.
“Oui, mais il n’a pas voulu me décrire sa situation. Il m’a seulement dit que des amis l’accompagnaient et que, parmi eux, se trouvait ton oncle.”
Je sursautai.
“Lénissu ?”, sifflai-je entre mes dents. Que diables faisait Lénissu fuyant Ato ? N’était-il pas censé avoir quitté la ville plusieurs jours auparavant en compagnie de Miyuki, de Dashlari et de Darosh ? Ça, c’était vraiment une surprise. Cependant, malgré ces questions sans réponse, je ne pouvais nier que j’éprouvais un grand soulagement de savoir que Spaw était si bien accompagné.
Connaissant Zaïx, je m’empressai de lui demander, avant qu’il ne rompe le contact, d’avertir Kwayat, Askaldo et Maoleth de ce qui était arrivé. Il prit congé avec ces mots :
“Je doute qu’ils ne soient pas déjà au courant. Mais, de toutes façons, je ne m’occupe pas de sauver les Démons de l’Esprit. J’ai déjà assez à faire avec vous. Je me demande quand est-ce que vous vous déciderez, Spaw et toi, à vivre ensemble et à cesser de vagabonder.”
Son insinuation me laissa sans voix. Zaïx pensait-il que Spaw et moi, nous nous aimions plus que de simples amis ? Je rougis et secouai la tête, en essayant de ne pas trop réfléchir au sujet.
Dans la caverne, on ne percevait que le murmure de l’eau et l’entrechoquement des bâtons de Kojari et Zanda. Frundis ronchonnait tout bas accompagné d’un bruit de cymbales agacé et il semblait réprimander son orchestre pour quelque son discordant. Alors, je me rappelai que j’étais perchée sur l’arbre probablement le plus haut de toute la zone et je me redressai pour chercher Syu. Je le trouvai quelques mètres plus haut, observant avec précaution un objet sombre et circulaire. À cet instant, un petit oiseau au plumage bleu clair vint s’y poser, un ver de terre dans le bec. Des pépiements d’oisillons s’élevèrent. C’était un nid de païskos, compris-je, aussi émerveillée que Syu.
“Il n’y a pas de bananes”, me dit alors le singe. “Mais on ne vit pas que de bananes !” Et il me montra triomphalement un fruit jaune semblable à celui qu’avait mangé Daorys. Il n’en fit qu’une bouchée et fila vers le haut en lançant : “Je vais en chercher un autre !”
Nous passâmes la demi-heure suivante à nous gaver de fruits jaunes. Ils avaient un goût très curieux, mais ils étaient incontestablement délicieux. Syu avoua même qu’ils lui semblaient presque aussi bons que les bananes, peut-être parce qu’ils avaient aussi une peau jaune. Cependant, il insista clairement sur le « presque ». Une fois repue et après avoir fait quelque course avec Syu sur le haut branchage, je déclarai :
“Je vais voir Drakvian.”
Syu acquiesça.
“Eh bien bonne visite. Moi, je rentre à la maison : la dernière fois que je suis passé près de son arbre, cela empestait plus qu’une moufette.”
Un sourire dansant sur les lèvres, j’entrepris la descente de l’immense arbre.